Le Rec Major à la sortie de l'ancien moulin
Branche de Rigarda du Rec Major à la sortie de l’ancien moulin

Here, this page in English

Aqui, aquesta pagina en Català

S’il est un élément qui, plus que tout autre, façonne le milieu naturel du village, c’est bien le « Rec Major », canal d’arrosage datant de la fin du XIIIe siècle (voir page histoire). Empruntons l’essentiel de sa description à une étude de Maurice JULIA écrite en juillet 1987 dans la revue « d’Ille et d’ailleurs » (n° 7 : Joch, un village, une histoire), document de référence capital sur le village.

La prise d’eau se fait sur la Lentilla, au lieu-dit « la Resclosa », à 3,5 km environ en amont du village, sur le territoire de Finestret. Après un cours sinueux de près de 2 km au-dessus de l’étroit du « Gorg de l’Olla », le canal sort de la gorge et domine le bassin de Vinça. Il passe sous la route au « pont de Vallestàvia » lieu où est mesuré son débit :

Le débit du ruisseau est mesuré sur les culées du Pont de Vallestàvia : 8 pieds 4 pouces de largeur ; hauteur d’eau 14 pouces

Maurice JULIA, D’Ille et d’ailleurs, n° 7, juillet 1987 page 28

Un pied de l’Ancien Régime vaut 3,284 dm et un pouce vaut 0,2707 dm ; en estimant la vitesse du courant à cet endroit à 4,5 km/h, le débit maximal est donc un peu supérieur à 90 litres par seconde.

Là, le canal dessert sur son passage le réseau d’arrosage au goutte à goutte de la plaine. Il continue ensuite en balcon jusqu’à arriver sur la partie haute du village au niveau du Carrer de la Creu.

Dans le village, sa pente s’accentue fortement jusqu’à atteindre « el Salt », soit deux chutes d’eau successives, l’une de 6 mètres au beau milieu du village et l’autre juste en aval de 12 mètres environ.

Grâce à son débit et à ses chutes, le ruisseau permettra de faire fonctionner jusqu’au XXe siècle deux moulins à farine, un moulin à huile, une fabrique de papier et une scierie. Au niveau de ces chutes, le ruisseau se divise en trois branches, une vers Rigarda, une autre vers Vinça et la troisième vers Finestret, qui débitent une ou deux « regadores » (quantité d’eau passant par un trou de 262 mm de diamètre).

Idem

Jusqu’à la fin des années 1950, le ruisseau était simplement creusé dans le sol. Maurice JULIA évoque avec nostalgie ce temps où le ruisseau était tantôt rapide, tantôt profond et paresseux au point que, l’été venu, la baignade y était de mise :

Combien de souvenirs de baignades dans l’eau fraîche là où le ruisseau déposait du sable doré, de promenades sur la berge ombragée, de baisers volés, de poésie liée aux mots « passallis, casot, palanca, tilla ».

Maurice JULIA, D’Ille et d’ailleurs, n° 7, juillet 1987 page 28

Le ruisseau a été alors cimenté pour limiter les pertes d’eau par infiltration, mais au détriment des berges devenues sèches. Il permet actuellement l’arrosage de plus de 500 hectares de terres agricoles :

La répartition de l’eau se fait selon un calcul rationnel et assez compliqué pour le profane, d’autant que le mois est divisé en « cours » du matin, du jour et du soir, répartition obligatoire car l’eau de la nuit est plus profitable, chacun doit pouvoir en disposer à son tour.

Idem

Le Rec Major continue à alimenter de nos jours toutes les fontaines disséminées dans le village. À Joch, grâce à lui, l’eau est omniprésente.

Texte : Gilbert JULIA